lundi 31 octobre 2011

Panique au Metropolitan Museum, suite et fin

Je crois que je viens de vivre la scène la plus curieuse de mon existence ! Notre « visite » au Metropolitan Museum avec grand-père était… surnaturelle ! Pourtant, au début, tout avait l’air normal.

Il y avait beaucoup de monde qui venait assister à l’expo : le fait que le grimoire soit exposé seulement deux jours rend l’événement assez exceptionnel pour que les visiteurs viennent en masse. Bref, il était très difficile d’avancer. Mais, dès les premiers pas à l’intérieur du musée, j’ai senti que Melkaridion était bizarre… Enfin, je veux dire, plus bizarre que d’habitude.

Il parlait tout seul, rien d’extraordinaires donc, mais d’une voix anormalement forte, pleine d’excitation. Il était complètement dans une autre époque. D’immenses grilles étaient exposées, qui venaient apparemment de Tolède. En passant devant elles, Melkaridion a montré à la foule de petites marques sur le métal en commentant : « J’étais attaché à cet endroit même. Heureusement, les liens étaient faits en crins de cheval, il m’était facile de me libérer ! » Les gens autour souriaient, certains se prirent même au jeu, et applaudirent en lançant des « Oh ! » admiratifs : ils pensaient que Melkaridion était un guide un peu original. Mais mon grand-père n’en avait pas fini : à l’entendre, chaque pièce du musée était liée à son histoire personnelle, et il nous racontait ses mille ans d’existence auprès des plus hautes autorités européennes. Les gens étaient captivés par cet homme si cultivé, capable de rendre aussi vivante l’histoire du Moyen Âge.

Puis, d’un seul coup, la mine de mon grand-père a changé. Il est devenu de plus en plus sombre, à mesure que ses « souvenirs » refluaient. Il s’est mis à raconter comment des milliers de magiciens – dont sa famille ! – avaient un jour été massacrés par des sorciers maléfiques. Il aurait perdu sa mère ainsi. Sa description était troublante de réalité, comme s’il avait effectivement été présent ! Au même moment, Master Markus, l’énorme cloche dont je vous ai parlé et qui fait tout de même plus de 6 tonnes, s’est mise à sonner inexplicablement. Il n’y avait personne pour la faire bouger, mais le son était bien réel, lui. Un mouvement de panique a alors traversé la foule. Plus le son de la cloche s’amplifiait, plus la foule s’inquiétait. La panique a atteint son paroxysme lorsque les murs ont commencé à trembler : tout le monde pensait que le Met était l’épicentre d’un séisme. Les murs ne semblaient pas vouloir céder, mais les objets volaient à travers les salles, avant de finir leur course au sol, souvent brisés en mille morceaux.

Contrairement à la foule affolée qui se ruait vers la sortie, mon grand-père, sans même sourciller, continuait à progresser vers la salle où était exposé le grimoire. Plus il avançait, plus le vacarme de la cloche se faisait puissant, et plus les convulsions du bâtiment s’intensifiaient. Arrivé au niveau de Master Markus, mon grand-père s’est immobilisé : se tournant vers elle, il a murmuré : « Elle devrait être muette… » Il répétait cette phrase en boucle, de plus en plus vite, de plus en plus fort, jusqu’à finir par hurler : « ELLE DEVRAIT ÊTRE MUETTE !!! » Là, comme par magie, la cloche lui obéit, et le silence se fit… Les rares personnes qui se trouvaient encore dans les parages et avaient assisté à la scène demeurèrent bouche bée. Moi aussi, j’étais ébahi devant l’exploit que venait d’accomplir mon grand-père.

Mais lui ne se souciait ni du regard des visiteurs ni de mes interrogations. Il a continué à se frayer un chemin à travers la foule, ses yeux cherchant désespérément le fameux grimoire. Quand il le trouva enfin, Melkaridion perdit tout contrôle. Il se mit de nouveau à hurler. Il disait que ce n’était pas normal que ce grimoire soit ici, qu’il aurait dû rester caché, oublié. Que, de toute manière, il lui appartenait. Surtout, que c’était une catastrophe pour notre famille. Enfin, dans un geste désespéré, il décida de briser la vitrine qui protégeait le précieux ouvrage. J’étais étonné de la vigueur qu’il y mettait : ces coups étaient d’une force inouïe, surtout pour un vieillard de presque cent ans. Mon grand-père était méconnaissable : il était impossible de le calmer, et la vitrine commençait à se fissurer.

Le son d’une alarme vint s’ajouter au vacarme de la foule en panique. Finalement, les gardes sont arrivés : ils ont menacé mon grand-père, qui a par bonheur fini par reprendre ses esprits. J’ai pu discuter calmement avec eux, et ils nous ont laissé sortir. De toute manière, ils avaient d’autres chats à fouetter, vu l’ampleur des dégâts ! J’ai donc pris mon grand-père par le bras, et on est sorti du Met. Il était temps !

Je dois avouer que je suis un peu dépassé par les événements. Il est temps que je demande des explications à ma mère, même si je dois pour ça affronter sa colère.

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